Paul, dans sa fuite, s'était naturellement dirigé vers son quartier dont le dédale de rues lui était plus familier. Qui plus est, son pc dans le sac à dos ne lui était plus utile dans l'immédiat. Avec précautions, il gagna son petit appartement, s'assurant qu'aucune surveillance policière n'était visible alentour au cas où un voisin aurait pu le reconnaître. Mais son voisinage se faisait tout autant discret que lui, chacun vaquant à ses activités sans se soucier du bien être du premier venu. Après un passage rapide d'une poignée de minutes pour déposer son sac, enfiler un manteau épais et long au col large, jeter un oeil sur internet à l'étalement du sujet sur les divers médias, il ressortit pour attraper une ligne de bus de nuit.

Durant le trajet qui lui prit plus d'une demi heure, il eut le temps de ruminer les dernières informations. Les Creed avaient perdu trace de leur fille. Soupçonnant le clan des McWard d'être impliqués dans plusieurs enlèvements récents, ils avaient échafaudé un plan avec les Feys pour capturer Alicia. Même si le patriarche lycan disait vouloir mettre la pression sur les McWard, Paul se doutait bien qu'ils s'en étaient pris intentionnellement à un autre clan de sorciers pour obliger ceux-ci à se confronter aux premiers suspects. Sorciers vs sorciers. Voilà l'idée. A leur forcer ainsi la main, ils risquaient surtout de mettre tous les sorciers du pays sur le dos de l'ensemble des Lycans et des Feys. C'était un plan plus que dangereux !

Et Paul dans tout ça ? Il se faisait l'émissaire des lycans, le messager qui va délivrer les informations sur le front. Plan à la con ... Comment avait-il pu se laisser prendre dans toute cette affaire ? Quel message allait-il livrer ? S'il racontait que les Lycans étaient liés aux Feys dans cette histoire (pour ne pas dire être carrément les principaux instigateurs), Aaron finirait bien par déterrer définitivement la hache de guerre depuis longtemps enfouie lors de leur précédente rencontre houleuse. Et quid des Mason ? A priori neutre, ils n'aideraient sûrement pas s'ils apprenaient toute la vérité ...

Quant à l'endroit où était détenue Alicia, Paul s'était presque vu promettre d'obtenir l'adresse à la seule condition d'aller retrouver les Mason. Une information en échange d'une autre, si toutefois James Reed tenait sa parole.

Le temps passait. 2 correspondances plus tard et un peu de marche à pied, la vitrine du Broken Circle faiblement éclairé par un lampadaire se présentait à lui. Minuit et quart. Pas d'éclairage à l'intérieur. Pas de clientèle visible. Le bar était clos. Paul observait à distance. Pas besoin d'aller frapper, sa présence était sûrement déjà détecté. Il attendrait un signe et un sentiment suffisant de confiance pour avancer, mieux jauger la situation et voir à pénétrer à l'intérieur de l'établissement. Cela pouvait être un piège, mais l'enlèvement d'Alicia n'en était pas un, lui. L'attention des principaux protagonistes semblaient se mobiliser en cette direction exclusivement.

De l'autre côté de la rue, Paul attendait dans une zone d'ombre. Une voiture s'approchait, il se mit à l'abri de l'éclairage des phares. Elle passa son chemin. Paul continua à guetter le signal pour se diriger la porte en espérant être reçu avec hospitalité plutôt qu'hostilité. Face à des sorciers, il pouvait s'attendre à tout. Creed l'avait envoyé là, sans doute au bûcher. Il risquait gros. Il repensa à Alicia. A Elise. De nouveau à Alicia.

À la suite du rituel, je soupirai de soulagement et laissai ma tête tombée vers l’arrière en fermant les yeux.

Damn, c’est décidé, je ne boirai plus jamais de boisson chaude, ever…

Maintenant seul avec Melany qui était en train de ranger les effets dont elle avait eu besoin, mon esprit se mit à vagabonder quelque temps pour contempler la situation toujours extrêmement problématique dans laquelle moi et Paul nous trouvions. Alicia était toujours portée disparue, kidnappé par un Cercle de Feys pour des raisons obscures ayant rapport, si j’avais bien compris, à des captifs Feys qui leur étaient précieux et qu’ils pensaient entre les mains de « maîtres » auxquels ils croyaient que nous étions affiliés. En entendant la formulation de la menace sourde professée par le responsable, les Mason semblaient l’avoir immédiatement prise au sérieux et ils m’avaient brièvement expliqué leur théorie.

Selon eux, les « maîtres » auxquels le Feys faisaient référence aux membres du clan McWard. Les sorciers les plus influents de toute la métropole, et de toute la Colombie-Britannique en fait. La question de l’enlèvement semblait toutefois être le principal élément qui inquiéta mes hôtes et je pus aisément discerner qu’Alicia n’était pas la seule à avoir disparu. Suite à quelques interrogations, le couple m’avait révélé que des sorciers de d’autres clans à travers la province avaient également disparus mystérieusement depuis les dernières semaines, mais cette information n’avait pas été ébruité parmi les médias humains puisque la nature de ces enlèvements paraissait avoir des causes surnaturelles. Malheureusement pour nous, Alicia était la seule des disparues jusqu’à présent dont la mère était humaine et qui avait faite comme n’importe quelle mère normale, prévenir les autorités pour chercher de l’aide. Bien sûr, la situation n’aurait pas été problématique si Paul avait conservé certaines informations pour lui-même, mais ça ne servait à rien de se lamenter sur notre sort. Nous devions faire avec…

Avec ce que je venais de leur rapporter, tout portait à croire que les coupables était un nouveau Cercle formé récemment par un elfe du nom d’Elroar et qui avait fait savoir que leur espèce ne tolèrerait aucune action malveillante portée à leur encontre. En revanche, la formulation du message qu’avait laissé les Feys venus kidnappés Alicia parlait de captifs que les McWard semblaient posséder… Cette situation devenait de plus en plus étrange. Non seulement il y semblait y avoir des disparitions de part et d’autre, mais en plus, chaque camp avait des raisons légitimes (ou indéniable dans le cas d’Alicia) de soupçonner les présumés coupables… Dans un cas comme dans l’autre, je n’avais qu’un objectif en tête, ramener ma nièce à bon port et me racheter aux yeux de ma belle-sœur. Tout ce que je voulais en ce moment c’était protéger Alicia et la tirer de ces complots qui nous dépassaient tous largement et qui la mettaient maintenant en danger, et ce malgré son innocence complète.

Gary était sorti depuis un moment et j’avais commencé à aider Melany à remettre leur salle de rituel en ordre, mais alors que j’étais en train de pousser une table qui avait été déplacé afin de faire de l’espace, j’entendis soudain les bruits étouffés d’un juron lancé dans ce que je jugeais être le salon de leur petit domicile.

Surpris, je haussai un sourcil avant de tourner mon regard vers Melany.

-Gary est-il au téléphone?

-J’imagine, oui. Répondit-elle d’un ton désinvolte en fermant la porte vitrée de l’armoire en bois. Cette dernière abritant la bibliothèque qu’elle et son mari avait accumulé au fil des ans.

-Ça n’a pas l’air d’aller…

-Il n’y a pas à s’en faire. Comme on te l’expliquait, nous connaissions Evan depuis longtemps, et la disparition d’Alicia nous à tous les deux ébranler. Il va mettre l’énergie qu’il faut pour…

Sa réponse fut cependant interrompue par un échange qui se voulut toujours subtile, mais dont la colère paraissait beaucoup trop intense. Toutefois, c’est surtout la seconde voix qu’on pouvait clairement entendre qui m’inquiéta…  

-Mais qu’est-ce qui se passe?! Dis-je soudainement en me dirigeant vers la porte de la chambre.

-Laisse, ce ne doit pas être grave ne t’en fais pas[/color], Melany avait-elle répondu en essayant de me devancer, mais j’avais déjà mis la main sur la poignée.

Ce n’est pas tant les propos qu’elle tint que l’intonation qu’elle eut en me les disant qui me freina dans mon élan. Mes noisettes se tournèrent vers elle avec un sourcil haussé de surprise. Elle voulait m’empêcher de sortir, il y avait quelque chose qu’elle ne voulaient pas que j’aille voir.

-Aaron… Reprit-elle calmement, ses yeux rivés dans les miens puisqu’elle se sentait démasquée. Aaron s’il-te-plaît fais-moi confiance. Laisse Gary faire, il va trouver l’information dont nous avons besoin.

Je la dévisageai avec une expression qui s’assombrit aussitôt. Ce n’était pas une question de confiance ici, si mes parents me disaient qu’ils étaient des alliés, je pouvais les croire, mais cette confiance devait marcher dans les deux sens, et ce n’est pas des cachotteries qui aideraient à bâtir cette relation confiance.

J’ouvris donc la porte et m’engageai dans le couloir menant au salon et quelque pas plus tard, je surpris Gary s’approchant vers moi pour me bloquer le passage.

-Gary, à qui tu parles?

-À personne que tu as besoin de parler petit, laisse-moi faire.

Sur ces paroles je remarquai un mouvement semblant se précipiter à l’abri derrière un des coussins du canapé situé près de la fenêtre. Le tout s’était déroulé en un clin d’œil, mais j’avais déjà vu cela auparavant et je n’eus aucune difficulté à l’identifier.

-QUOI!! M’emportais-je en tentant de pousser Gary hors de mon chemin. Un sylphe ici!

Le petit homme qui ne devait pas être plus grand que ma main sortie timidement la tête de son abri pour me regarder avant de se cacher à nouveau.

-CALME TOI AARON!! M’intima sèchement Gary qui peinait à me retenir. Il peut nous aider, il n’a rien à voir avec ce qui s’est passé.

-Pousse-toi de mon chemin Gary, je ne le répèterai pas!

-Ou quoi tu vas me faire du mal? Ta magie ne fonctionnera pas ici, nous avons fais attention à ce que personne parmi nous puisse faire du mal à un autre individu dans notre établissement. Tu peux engueuler Echo autant que tu veux, mais sors-toi de la tête l’idée de lui faire du mal. Sinon je vais me faire un plaisir de te botter le cul hors de mon bar et de te laisser de démerder seul pendant que nous essayons de retrouver Alicia de notre côté.

Surpris, j’écarquillai les yeux de surprise et pivotai ma tête pour observer Melany derrière moi qui, sans dire un mot, paraissait tout aussi résolue que son mari.

Sous le coup d’une impatience nourrit par l’exaspération de savoir que je ne paraissais pas avoir le choix de suivre leurs indications. Je levai mes mains en l’air en signe de résignation puis demanda aussi posément que je le pus malgré la colère qu’on pouvait aisément sentir dans ma voix.

-Bon, alors qu’est-ce que « Echo » t’as dit? Rien de bon j’imagine si je dois me fier à votre engueulade…

Sur ma réplique assassine, mon hôte se contenta simplement de m’observer d’un regard lourd avant de reculer d’un pas pour laisser moi et Melany entrer tout en se dirigeant vers l’emplacement ou Echo s’était caché et qui était maintenant hors de vue.

-C’est bon tu peux sortir, lui dit Gary sans dévier ses yeux des miens.

Je continuai à juger lourdement du regard l’homme qui me faisait face et j’attendis patiemment que l’interpellé apparaisse, et il le fit. Le sylphe était d’une taille normale pour son espèce, soit quelque dizaine de centimètres et avec de petites ailes quasi-transparente. Vêtu de simples habits faits à l’aide de feuilles plier et attaché à l’aide de ce qui semblait être des fils assez simplistes. Ses courts cheveux roux dressé au-dessus de sa tête en petite pointe encadraient un visage visiblement effarouché par la situation et qui me dévisagea avec une crainte mêlée d’agacement. La peau qui n’était pas couverte par son habit était d’une blancheur crémeuse à l’exception d’une section sur son front et autour de son œil droit sur lequel un motif de vigne avait été peint en vert.

Je n’avais pas rencontré de Fey depuis des années, et je sentais surtout qu’il n’appréciait pas du tout mon hostilité. En revanche il n’avait visiblement aucune intention de me faire du mal. Cela ne m’empêcha pas de le fixer avec colère le temps qu’il daigne m’expliquer ce qu’il se passait.

État et inventaire:

Aaron et un couple sortirent bientôt du pub. D'après la description reçue par tél, il devait s'agir de Gary et Melany. Mais au lieu de se diriger vers lui, ils remontaient la rue, 2 côté trottoir et 1 sur la chaussée. Ils allaient vraisemblablement prendre place dans un véhicule. Paul, avec son détour par l'appart, avait été un peu plus long que prévu pour se pointer au rendez-vous et les voilà qui allaient partir sans lui ! Avançant au milieu du carrefour, mains dans les poches, il se fixa au centre du halo de lumière projetée par un lampadaire.

Sentant enfin sa présence, les sorciers se retournèrent vers lui et firent le premier pas vers lui. Aucun signe d'hostilité n'émanant d'eux, Paul les rejoignit dans la partie la plus sombre de la rue. Les présentations furent vite faites. Gary et Melany paraissaient enchantés de faire sa rencontre. Etait-ce par curiosité ou de la réelle sympathie ?

- Bon. Quel est le plan ?

Ils lui racontèrent rapidement et sommairement ce qu'ils savaient. Les propriétaires du pub étaient les plus bavards, sans doute avaient-ils été prévenus de sa visite par James Reed. Leur plan d'action du moment était d'aller trouver Elroar pour qu'il relâche la fillette. S'interrogeant sur le fait qu'ils aient pu obtenir sa localisation, ils lui avouèrent qu'ils comptaient sur le lycan pour les aider à pister leur trace plus finement. Super ! Paul n'était bon que pour jouer au chien limier ...

- C'est ça votre plan ? Débarquer chez Elroar et de lui demander plus ou moins gentillement de nous rendre Alicia ? Vous croyez avoir les arguments pour le convaincre ? Elroar a perdu des siens et il n'est pas le seul ... Il ne relâchera pas la gamine tant que vous ne lui apporterez pas les preuves de la culpabilité des McWard.

3 sorciers qui se déplaceraient pour récupérer l'une des leurs sur le terrain des Feys, cela ressemblerait plus à de l'hostilité qu'à un souhait de dialogue. Et Paul aux devants d'eux passerait pour larbin à leurs services. Aaron releva le souhait de voir sa nièce. Paul releva un autre fait.

- L'heure tourne. Nous n'avons que trop perdu de temps chez Elise. Si vous voulez des nouvelles de la fille, je m'en charge. Mais ne perdez pas de vue que tôt ou tard, vous devrez aller frapper à la porte des McWard ...

Une fois de plus, Paul proposait d'agir chacun de son côté. Ainsi en a-t-il toujours été. Le lycan pourrait aller voir les Feys en toute courtoisie. Mais se pointer chez un clan de sorciers hostile à toutes autres espèces ... Sans lui ! Et ce n'était pas à un petit clan de sorciers neutres qu'il pouvait se fier pour sa défense.

Au délà de toute cette histoire, il y avait une rivalité qui s'était réouverte entre Aaron et Paul depuis le matin. Cela dépassait la simple hostilité entre espèces, le jeu du chat et de la souris. Les deux voulaient inconsciemment se prévaloir du droit de protecteur d'Elise et Alicia. Le premier revendiquait son lien du sang et son rôle de mentor auprès de sa nièce. L'autre, ancien amant de l'humaine, se rêvait naïvement comme père adoptif de la jeune orpheline. Les deux éprouvaient un vide dans leur vie à combler en s'appropriant ces deux vies. De là un combat de testostérone entre les deux hommes ..

Ce n’est qu’une fois que nous fûmes sortis de l’établissement que le grand méchant loup décida de faire son apparition. Heureusement, il était suffisamment imposant pour ne pas passer inaperçu! Dès que je le vis, je luis fis signe de nous rejoindre de notre côté de la rue et m’empressai de faire les présentations sommairement.

Gary et Melany s’avancèrent avec un sourire chaleureux sur leurs traits qui prit à la fois Paul et moi de court. Je n’avais jamais vu une telle ouverture d’un sorcier à l’égard d’un lycan, et à voir son visage, le concerné devait avoir eu une réflexion similaire.

Cela dit, fidèle à ce qui semblait être son habitude, il aborda le sujet sans ambages.

-Bon, quel est le plan?

Toutefois, au fur et à mesure que nous lui expliquions ce que nous nous apprêtions à faire, je remarquai aisément les doutes croissants qu’il avait. Et il le fit savoir assez abruptement.

-C'est ça votre plan ? Débarquer chez Elroar et de lui demander plus ou moins gentillement de nous rendre Alicia ? Vous croyez avoir les arguments pour le convaincre ? Elroar a perdu des siens et il n'est pas le seul ... Il ne relâchera pas la gamine tant que vous ne lui apporterez pas les preuves de la culpabilité des McWard. L'heure tourne. Nous n'avons que trop perdu de temps chez Elise. Si vous voulez des nouvelles de la fille, je m'en charge. Mais ne perdez pas de vue que tôt ou tard, vous devrez aller frapper à la porte des McWard ...

Son ton arrogant et moralisateur était de trop pour moi… Et bien que Gary et Melany ne semblaient pas s’en être formalisés, je répondis du tac au tac à Paul sans trop réfléchir avant de laisser les mots franchir mes lèvres.

-Souvenons-nous quand même de la raison qui nous a poussé à fuir tous les flics de Vancouver durant une demi-journée… Dis-je en fixant le lycan directement dans les yeux sans préciser l’étendue de mes paroles.

En m’entendant, Gary et Melany échangèrent un rapide regard entre eux, mais ne dirent rien. Je ne leur avais pas parlé du fiasco que Paul avait causé, mais je ne me gênerais pas à le faire s’il m’y obligeait, et mes iris ne laissèrent planer aucun doute sur mes intentions.

-Et puis, pour ton information, nous n’avons pas pris cette décision sur un coup de tête. On sait de source sûre qu’Elroar n’a probablement jamais eu l’intention que l’enlèvement d’Alicia sorte dans les médias humains. Il pensait que cela resterait dans notre petite communauté et en apprenant qu’il met tout notre secret à risque, il y a de fortes chances de se rétracter. Si c’est un meneur de Cercle, il n’est clairement pas assez con pour ne pas se rendre compte de ça.

-Ce n’est pas seulement ça, intervint Gary en sentant que la situation s’envenimait. Il faut comprendre qu’Alicia n’est pas la seule sorcière à s’être fait enlevée dernièrement, et cela a commencé visiblement au même moment que les disparitions de Feys. Ce genre de brèche dans leur réseau d'alliance ne rend aucunement service aux McWard non plus puisqu’un de leurs principaux arguments de vente, c’est que de les servir assure une protection solide. Crois-moi Paul, Melany et moi avons été leurs larbins pendant des décennies. S’ils étaient effectivement les responsables, ils n’auraient jamais été aussi maladroits, et s’ils connaissaient les coupables, ils n’auraient pas laissé la situation dégénérée de la sorte. Ils ont la force qu’il faut pour punir leurs ennemis, et ne se gênent pas pour s’en servir.

-Je ne comprends pas toutes les nuances de la situation, renchérit Melany, mais c’est visiblement un malentendu pur et simple. Avant que quoi que ce soit n’arrive à Alicia, il vaut mieux aller parler à Elroar. Si vous pensez absolument que les McWard sont coupables, moi et Gary allons tirer les ficelles de nos contacts pour voir ce qu’il en est, vous pourrez aller chercher Alicia pendant ce temps. Je ne pense pas que nous séparer ainsi est la meilleure idée en ce moment, mais si ça peut servir de compromis Paul, je ne vois pas de problème à le faire.

Une part de moi fut reconnaissante que les Mason ne m’exclut pas de cette opération délicate, mais j’eus la nette impression qu’il savait pertinemment que d’essayer de raisonner avec moi sur ce point serait une cause perdue…

En revanche, je continuai de fixer le lycan me faisant face et remarquai quelque chose dans son regard. Je n’arrivai pas à mettre le doigt exactement sur ce dont il s’agissait, mais je ressentais une certaine rancœur de Paul à mon égard. Et quelque chose me disait que cela n’avait rien à voir avec les propos que je venais de lui tenir, ou ceux que j’avais prononcés avant notre séparation cet après-midi. Cela avait rapport avec Alicia, visiblement… Que s’était-il passé lors de leur rencontre? Que s’était-il produit pour qu’il se retrouve lié à ce point?

Une question qui nécessiterait d’être exploré en temps et lieu, mais pour l’instant il fallait conserver nos priorités. Une chose restait absolument sûre pour moi, Paul n’irait pas seul chercher Alicia. Contrairement à ce qu’il croyait, je n’avais aucune intention de m’attaquer aux Feys. Du moment qu’ils accepteraient de rendre ma nièce saine et sauve je serais même prêt à les aider à trouver leurs captifs en guise de ma bonne foi. Surtout maintenant que le problème semblait plus généralisé que ce que nous avions anticipé initialement.

État et inventaire:

Malgré la dureté de son ton et de ses mots, les sorciers n'avaient pas lâché leur intention de se rendre chez Elroar. Même s'ils mettaient tous les trois en avant la face pacifique de leur démarche, Paul sentait que cette histoire allait leur/lui pétait à la gueule une fois de plus comme ce matin. Mais cette fois, il n'en serait pas le détonateur ! Il ne croyait en rien à ce supposé malentendu. Comme s'il suffisait de discuter sereinement 3 minutes autour d'une tasse de thé pour lever tout quiproquo, échanger de plates excuses et repartir avec la fillette tout simplement ! De mémoire, la dernière tasse de thé partagée lors d'une discussion avait fini dans la tronche d'Aaron. Paul comptait se tenir à bonne distance de tout prochain breuvage chaud qui serait proposé ...

Toutes leurs affaires de clans, d'interactions entre les diverses communautés, tout cela il n'en avait cure ! Paul n'avait jamais demandé à devenir Lycan, à participer à leurs histoires. Pas plus qu'Alicia qui, orpheline, aurait eu l'opportunité de retrouver une vie normale, une vie humaine. Aaron avait débarqué comme un cheveu sur la soupe pour lui gâcher cette chance unique et la plonger en première ligne d'une intrigue qui touchait toutes les espèces surnaturelles de la région. Et Elise s'ajoutait en dommage collatéral ...

Pas pour rien si les lycans étaient pour la plupart solitaires : non seulement ils n'avaient en rien souhaité leur condition, mais contrairement aux vampires, ils ne bénéficiaient pas d'un sérieux avantage au change du genre vie éternelle. Foutue malédiction ... De fait, il en voulait un peu aux autres races. A certaines plus qu'à d'autres. Autant dire que collaborer avec l'une d'entre elles relevait de l'effort surhumain, ou plutôt sur-surnaturel !

Bref, il en était à sentir l'obligation de se coltiner ces 3 loustics jusque sur les terres des Feys. Paul rongeait son frein, ruminant la stratégie à adopter. Leurs beaux discours qui se voulaient rassurants lui entraient par une oreille pour ressortir par l'autre. S'ils se rendaient compte qu'il ne les écoutait qu'à moitié, ils restaient toutefois assez courtois jusqu'au bout. Même l'énervé de service semblait refréner sa rancoeur. Cette idée là lui apporta une esquisse de sourire. Le lycan agaçait le sorcier et ce dernier ne pouvait lui renvoyer la pareille car, à cet instant, ils avaient besoin de ses services.

Il y eut un temps de silence. C'était au lycan de s'exprimer. Il leur jeta un regard à chacun alors qu'ils étaient pendus à ses lèvres. Paul finit par s'exprimer avant que l'attente ne finisse par les exaspérer.

- OK. Allons-y.

Aussi loquace qu'à l'accoutumé, il acceptait de les accompagner vers le parc national. Sur place, il les guiderait donc jusqu'à la tanière supposée d'Elroar si toutefois il arrivait à relever une trace et s'ils s'y trouvaient encore ! Beaucoup de si ... Au moins, il jouait leur jeu. Du moins, en apparence. Chacun se dirigeant vers une portière de la voiture de Gary, Paul réactiva le téléphone d'Alicia et envoya un rapide texto à sa mère : Parc national. Il le referma sans couper la liaison data. Ce n'était pas une invitation à les retrouver, l'indication géographique était trop large pour pouvoir s'y donner un rendez-vous précis. Il espérait que d'une façon ou d'une autre l'agent Cooper accède à cette information et l'exploite pour donner au lycan à un moment donné une diversion pour poursuivre sa mission de secours en solo ...

Le trajet en voiture avait duré une éternité. La présence du lycan dans le véhicule limité certes les sujets de discussion : les sorciers ne pouvaient ainsi évoquer leurs histoires, familles devant cet étranger. Gary chercha bien à parler de sujets divers, de la pluie et du beau temps, mais la tension palpable entre les 2 passagers arrière fit capoter leur tentative de briser la glace. Au final, cela se termina par un dialogue juste entre Gary et sa conjointe, comme ignorant leurs hôtes mutiques. A la limite de l'impolitesse, Paul sortit son téléphone et s'équipa d'écouteurs pour se jouer sa playlist (musiques des années des nineties) en attendant la fin du voyage.

Enfin ils s'arrivèrent auprès de bâtiments au centre du Parc. Le conducteur s'écarta de la voie bitumée pour camoufler son véhicule au milieu de la végétation. Il laissa d'ailleurs les 3 autres s'en charger eux-mêmes. Pas par égoïsme, mais plutôt pour garder encore une certaine distance entre eux et lui. Il en profita pour se rapprocher d'une pancarte présentant un plan complet du Parc qui était en fait une réserve naturelle pour différentes espèces d'oiseaux, un endroit protégé, le site parfait pour les Feys !

D'après la disposition des lieux, les routes, les chemins piétonniers, la tour d'observation, les quelques bâtiments touristiques, la partie Nord était la zone la moins exposée à la présence de l'homme. C'est par là qu'il fallait commencer les recherches. Il rejoignit le trio de sorciers qui discutait de la stratégie de leur déploiement dans les environs. Ils voulaient jouer la discrétion. Bizarre ... S'ils voulaient discuter avec Elroar, ne devraient-ils pas plutôt s'annoncer ? Ou bien avaient-ils tout simplement peur que celui-ci "disparaisse" s'il voyait débarquer des sorciers. Le couple prévoyait d'aller inspecter les îles, moins faciles d'accès.

- OK, moi j'vais voir dans la partie nord. Mieux vaut que je sois seul en tête.

Paul avait tourné à son tour la tête vers Aaron, lui rendant son regard. En tant que Lycan, il n'était pas un ennemi par définition des Feys. Sa présence si détectée n'apparaîtrait pas hostile s'il n'était pas accompagné d'un sorcier. De toute façon, jouer la discrétion n'était pas du tout son truc. Ainsi il demandait à son binôme imposé de lui suivre à la distance pour ne pas gâcher leur rencontre espérée avec les kidnappeurs d'Alicia. Il s'adressa cette fois à Gary :

- Si on tombe sur eux en premier, Aaron vous préviendra.

Ceci étant dit et convenu, Paul partit dans la direction qu'il s'était fixé. Le terrain est humide. L'atmosphère moite embaumait l'iode. C'est sûr c'était la même odeur qu'il avait relevée dans la chambre d'Alicia. L'air marin emplissait ses poumons. Il avança à pas mesurés, cherchant à identifier différentes fragrances qui auraient pu le mettre sur une piste ou une autre. Au bout de quelques dizaines de mètres, il s'arrêta et fit un tour d'horizon comme cherchant son chemin mais aussi pour s'assurer qu'Aaron ne se serait pas bêtement rendu détectable.

Je fus heureux de voir que Paul ne rouspétait pas à ma décision de l’accompagner. J’avais imposé ma présence, et je m’attendais à ce qu’il tienne à se débarrasser de moi à la première occasion. Pourtant il acquiesce sans trop de peine en me rendant mon regard sans rien ajouter, laissant son silence parler pour lui.

Je restai un court instant attentif à son expression, mais n’y remarquai rien de conclusif. J’espérai que c’était le signe d’un semblant de coopération, puisque nous en aurions sans doute besoin dans les heures à venir.

Nos deux autres acolytes se consultèrent à nouveau silencieusement d’un rapide coup d’œil, comme pour se confirmer que de nous laisser seuls n’allait pas mal se terminer, puis Gary fit un pas de notre direction.

-Bonne chance à vous deux. N’oubliez pas que c’est Alicia qui compte alors gardez vos duels de coq pour après qu’on l’ait retrouvé. Ce n’est pas le moment, et vous le savez.

Melany s’approcha de moi pour prendre mon épaule dans sa main et serrer brièvement en guise de soutien, puis elle et Gary passèrent brièvement leur main au-dessus d’un bracelet qu’ils portaient à leur poignet et les deux s’élevèrent rapidement vers le ciel. Dans le temps de le dire, les deux silhouettes avaient passé la cime des arbres et se dirigèrent vers l’Ouest en direction du large. Nous étions laissés à nous-mêmes…

Il avait manifesté son désir de partir en avance et je n’argumentai pas. Non seulement je ne voulais pas lancer un débat, mais dans les faits nous n’avions pas nécessairement besoin d’être à côté pour pouvoir réagir. Du moment que je pouvais le voir, ça me suffirait. Qui plus est, la logique du lycan faisait beaucoup de sens. La section se prolongeant vers l’océan était le seul qui pouvait plausiblement abriter Elroar et son cercle hors de vue des éventuels touristes. Les Feys avaient plus d’un tour dans leur sac pour passer inaperçus, et malgré la petitesse du parc national, ils avaient définitivement les moyens de ne pas être repérés.

J’étais reconnaissant tout de même qu’Elroar eût choisi ce parc plutôt qu’un autre de la province. Ce n’était pas les options qui manquaient pourtant. Avec la quantité de lieux isolés et quasi inaccessibles des Rocheuses avoisinantes, il aurait pu nous compliquer nettement la tâche. Cela en était même suspect en fait, mais avant de paniquer, j’allais me concentrer pour au moins tirer au clair la situation.
Le temps de ma courte rêverie, Paul avait déjà pris un peu d’avance et, surpris, je joggai rapidement vers lui pour le rattraper. Puis, avant qu’il ne se retourne pour continuer son chemin, je lui fis signe d’attendre pour lui dire rapidement.

-Je ne sais pas si tu as déjà rencontré des Feys, ils sont plutôt rares, mais si tu n’en as jamais vu, tu dois rester vigilant. Les Feys peuvent user d’enchantement et très peu de lycan ont l’esprit suffisamment discipliné pour y résister. Fais attention et si tu sens que quelque chose cloche, n’hésite pas à me faire signe. Je vais rester attentif à toute forme de magie dans mes environs, mais si tu es en avant il se peut que je le repère trop tard. Ne va pas à plus d’une quarantaine de moi, juste pour être sûr.

Sur ce dernier conseil, je l’invitai à prendre les devants et me mis à marcher à sa suite légèrement plus lentement afin qu’il prenne la longueur d’avance qu’il souhaitait.

Leur progression fut lente. La végétation et le terrain meuble, humide duquel leurs pieds peinaient à se dégager les ralentissaient.
Leur progression fut prudente. Les sens en alerte, ils guettaient tout son, tout mouvement, toute odeur.
Leur progression fut inconsciente. Inconsciente du niveau de protection magique qui y avait installée et qui avait déjà surpris Aaron dans la chambre d'Alicia.

Même cette fois, c'est Paul, premier de cordée qui se prit la barrière invisible. Un voile obscur lui passa devant les yeux et un germe de la colère se mit à croître rapidement au plus profond de son âme. Surpris par un début de transformation non contrôlée, non désirée, la douleur de la métamorphose le pétrifia sur place, puis lui tordit les membres, le forçant à se cambrer, à se plier à deux. Il ne peut lutter contre le processus enclenché. D'atroces migraines retentissent dans son crâne comme des milliers de clous. Les mains fortement appuyées sur ses tempes, il aurait voulu les faire taire en compressant son cerveau. En vain ...

Aaron surpris tout autant par ce que subit son partenaire s'élance à son encontre pour venir à son secours ne se doutant pas qu'il avance vers la mort. Du coin de l'oeil, le loup garou en puissance n'a plus suffisamment de conscience humaine présente pour lui hurler de s'éloigner qu'il représente désormais. Le temps que le sorcier comprenne ce à quoi il vient de se heurter et ce qu'il subit à l'instant, il sera trop tard ! Sans doute s'interrogeait-il sur le pourquoi de cette transformation si soudaine sans préavis et sans qu'aucun élément extérieur perceptible ne le justifie.

Vainement, Paul cherche à se battre contre la bête intérieure. Une force magique a annihilé sa force mentale. L'humain qu'il était évolue vers l'animal, le fauve, la bête féroce. La colère et la faim se mélangent, se confondent et finissent par converger vers un seul but, un unique objectif : tuer ce sorcier qui s'approche de lui ! L'instinct animal lui dicte de se ruer vers son ennemi naturel.

Le lycan est maintenant complètement formé, il se tient debout et tourne sa gueule aux babines grognantes et bavantes en direction de sa proie. Celle-ci esquisse un pas réflexe en arrière, avec une certaine difficulté, les pieds toujours embourbés. La bête s'en aperçoit. Elle a sa force qui joue en sa faveur et se trouve dès lors sur un terrain plus avantageux que pour le sorcier.

A quel moment se rendra-t-il compte que Paul n'a plus le contrôle ? Le loup garou ne se pose pas la question et se rue aussitôt sur sa cible bien décidé à lui ôter le dernier souffle de vie et de finir par en faire son prochain repas ...

Oh my freaking god… Me dis-je en m’arrêtant interloqué.

À l’avant de moi je pouvais percevoir l’immense aura d’enchantement qui se déployait à quelques dizaines de mètres. À l’endroit pile où j’apercevais la silhouette de Paul. Sur le coup, j’avais instinctivement voulu lui prêter main-forte, mais en entendant ses cris devenir plus gutturaux. Je sus rapidement dans quel pétrin je me trouvais maintenant. Même si la signature magique de ce rituel était typique des Feys, sa fonction était claire, diviser pour mieux régner comme le dit le dicton…

Cette situation avait une forte impression de déjà-vu…  En revanche, il y avait une variable majeure qui s’était modifiée dans le cas présent. En effet, comparativement à cet après-midi d’avril, Paul ne se retiendrait aucunement, il allait vouloir tuer tout ce qui lui tomberait sur la main. Il fallait que j’appelle Gary et Melany, ils pourraient rééquilibrer la balance.

Eh merde… Pensais-je en paniquant. La fuite n’était pas une option et comme je l’avais déjà vécu par le passé, un combat singulier contre un lycan ne pourrait que finir mal…

Ma seule chance était d’essayer de contrer l’enchantement qui venait de prendre racine dans son esprit. Ou à tout le moins de l’amoindrir suffisamment pour que le fauve puisse reprendre le contrôle de ses gestes. Mais pour cela, j’avais besoin de l’immobiliser pour éviter que mes sortilèges se perdent dans le vide. Je n’avais pas le choix, il fallait que j’affaiblisse le lycan avant toute chose. Et cette simple idée me figea de peur…

Ma stupeur fut brisée lorsque le fauve se redressa de toute sa hauteur. Une montagne de muscle et de fourrure d’une noirceur digne du jais qui se retourna d’un coup vers moi. Ses babines retroussées laissèrent s’échapper un grondement menaçant qui fit presque vibrer l’air environnant. Instinctivement, je me sentis faire un pas à reculons dans le vain espoir de fuir mon adversaire, mais je savais pertinemment qu’il n’y aurait aucune fuite.

J’invoquai ma protection à l’instant où il bondit vers moi. Pas le temps de faire dans la complexité. Je me contentai de créer un simple, mais puissant dôme d’énergie azurée qui réceptionna la masse de la créature sans broncher. Malgré le fait que je sentis qu’il avait voulu m’écraser avec toute la subtilité d’un char d’assaut à plein régime, ma barrière resta complètement immobile.  

J’avais toujours eu un don inné pour faire ce genre de sort, et fort heureusement pour moi, le lycan allait devoir beaucoup se risquer pour tenter d’abattre ma protection. Si je pouvais l’avoir à proximité, il suffirait de quelques sorts d’évocation bien placés pour le mettre K.O. suffisamment longtemps pour stopper l’enchantement. Du moins, c’est ce que j’espérais…

La brutalité de l’arrêt fit tomber Paul à la renverse, mais il usa de son petit vol plané pour se réceptionner sur le dos et se redresser dans le temps de le dire. Griffe en position et l’œil alerte. Il était peut-être complètement hors de contrôle, mais son instinct de prédateur le maintenait sur ses gardes. Il savait qu’il était également en danger et qu’une imprudence pourrait lui coûter cher même si la balance de la situation était clairement à son avantage.

-Paul… Si tu es encore là-dedans, secoue-toi! Dis-je en essayant d’aller chercher le cellulaire dans ma poche de manteau. Ce n’est qu’un enchantement, tu peux le faire! Pense à Alicia. À pourquoi tu es ici. Il faut que tu te réveilles!

J’avais peu d’espoir qu’il comprenne, mais je ne pouvais pas m’empêcher de vouloir stopper cet éventuel bain de sang avant qu’il ne commence.

En comprenant que mes poches étaient vides, je me souvins aussitôt que c’était Paul qui avait conservé son cellulaire pour contacter nos deux autres alliés. Or, dans l’état où se trouvaient ses vêtements, j’étais prêt à parier que ce dernier était tombé à l’eau maintenant. Contactez Gary et Melany n’était plus une option… Tu parles d’une connerie…

Sans prévenir, le lycan reparti à l’assaut, et avant qu’il ne matraque ma protection à nouveau de quelques coups de patte surpuissants, je propulsai aussitôt un large arc de cercle lumineux pour m’assurer que même s’il tentait d’esquiver, il aurait de grande chance d’être percuté quand même par la vague d’énergie fonçant vers lui.

État et inventaire:

Répondant à un pur instinct primaire et bestial, le lycan s'était précipité tête baissée comme un taureau fonçant sur la cape rouge que le torero lui agite sous le nez. Dénuée d'intelligence humaine, temporairement bloquée par magie, la charge fût stoppée nette par un mur de protection invisible dressé par le sorcier en toute urgence. Le choc projeta la bête en arrière qui retomba sur le dos dans une giclée de boue et d'eau croupie. Elle se redressa promptement et sortit les griffes, l'air passablement irrité.

La proie qui n'avait pas bronché sur le premier choc baragouina quelque chose, sans doute une quelconque incantation qui, dans l'inconscient de l'animal, signa une action hostile qui l'énerva encore plus. Car de Paul, il ne restait aucune trace à cet instant précis, comme endormi. Dr Jekyll avait cédé la place à Mr Hyde. D'un terrible rugissement qui résonna à plusieurs dizaines de mètres alentours, elle marqua sa supériorité. Là encore, par ce cri qui pouvait alerter des alliés du sorcier, on devinait aisément que le prédateur avait perdu toute connaissance d'éléments précédents connus de Paul qui auraient pu être utilisés à l'avantage de l'assaillant. C'était sans doute ce qui sauverait Aaron.

Ou pas ... Car le lycan repartit à l'attaque bien qu'avec un certain niveau de puissance suite au premier constat de ce mur dressé entre lui et son gibier. A grands pas mesurés, observant les gestes du sorcier dans sa bulle. Mais ce dernier qui avait mûri avec les années n'avait pas attendu pour lancer à son tour une attaque et une puissante projection magique jaillit rapidement en direction de son agresseur le frappant sur le flanc droit alors qu'il cherchait maladroitement à éviter cette attaque partie plus rapidement qu'anticipé.

De rage, la bête frappa le sol dans des gerbes d'eau. Sa tête roula d'un côté à l'autre, d'énervement et cherchant à lutter contre le réveil de son hôte. Sans perdre de temps et malgré sa blessure toute fraîche, elle sauta littéralement sur son adversaire. Au contact du dôme magique, ses pattes frappèrent la couche protectrice à tour de rôle et à grandes brassées tout en meuglant, rageant, bavant dans une volonté d'effrayer, déstabiliser sa cible qui, malgré les efforts fournis, ne semblait pas ciller tant que cela.

La seconde attaque magique prudemment préparée à l'abri du premier sort frappa le loup garou de plein fouet et le projeta plus loin et plus haut. Une fois de plus, le sol meuble amortit la chute. La colère était toujours présente et avait été attisée par ce nouveau coup subi. Alors, la bête mit bien malgré elle son impatience de côté. Elle prit plus prudemment encore le temps d'observer sa cible, prête à réagir en cas de faille pour attaquer ou au contraire pour réagir en mode défensif. Elle jeta aussi un oeil à ses blessures qui cicatrisaient lentement.

Cette capacité surnaturelle de régénération lui redonna confiance en elle, se sentant une fois de plus supérieure au faible humanoïde qui se tenait à distance raisonnable. Calant ses pattes dans le sol en position pour bondir pour charger ou esquiver, le lycan se courba et ouvrit sa gueule pour pousser un nouveau et puissant rugissement ! La surface de l'eau en trembla.